La précarité en Belgique, une affaire de femmes ?

Série : Élections 2024,l’avenir de la Belgique ne se fera pas sans les femmes !

La précarité en Belgique, une affaire de femmes ?

 

Le Groupe de travail sur la discrimination à l’égard des femmes et des filles des Nations Unies a choisi en 2023 de se pencher sur le lien entre inégalités de genre et pauvreté dans son rapport annuel. Ce choix n’a rien d’étonnant lorsque l’on s’intéresse ne serait-ce qu’aux chiffres de la pauvreté. Les récentes projections mondiales démontrent ainsi que près de 388 millions de femmes dans le monde vivent dans l’extrême pauvreté, soit en-deçà du seuil de 1,9$ par jour. Certes, on pourrait penser que ce sujet concerne majoritairement les pays dits du “Sud” puisque  83,7 % d’entre elles vivent en Afrique subsaharienne . Mais les taux de pauvreté nationaux nous montrent bien que la précarité des femmes est aussi une affaire belge. 

 

En 2019, l’Institut national de statistique de Belgique avançait que 70% des personnes en situation de pauvreté individuelle étaient des femmes. Être en situation de pauvreté individuelle se traduit numériquement par un revenu net inférieur à 1.025 € par mois. Mais la réalité est que le revenu médian des femmes en situation de pauvreté individuelle est bien inférieur même à ces 1025€ puisqu’il se situe aux alentours de 381 € . Et ces chiffres sont antérieurs à la crise du coronavirus, l’inflation, et la crise énergétique qui ont d’une part renforcer la précarité, d’autre part creuser les inégalités. A cette échelle, la question de la précarité est aussi une question de logement, d’alimentation, de dignité humaine, de survie. 

 

Sur le lien entre précarité et inégalités de genre, les regards se tournent souvent vers les inégalités salariales. Sujet très médiatisé, il a été par le passé le fer de lance des politiques de réduction des inégalités et de l’activisme féministe. De fait, l’écart salarial horaire s’est considérablement réduit ces dernières années pour atteindre un taux de 5% en 2023 . Mais lorsque l’on s’intéresse au salaire annuel, la réalité est autre. Sans correction pour la durée de travail, cet écart s’aggrave significativement pour atteindre 21% . En fait, si l’on regarde l’évolution de l’écart salarial annuel non-corrigé, on constate qu’il diminue bien plus lentement que l’écart salarial horaire .

 

Qu’est-ce que cela signifie ? Cela signifie que les progrès faits en matière d’égalité salariale sont contrés, voire annulés par une autre inégalité de genre : la durée de travail. En d’autres termes, une inégalité peut en cacher une autre. En Belgique, les femmes sont plus fréquemment dans des contrats à temps partiel. Ainsi, 40,7% des femmes salariées sont à temps partiel, soit 3,4 fois plus que les hommes salariés dont le taux de travail à temps partiel est de 11,9%. Ces inégalités vont avoir de graves conséquences sur leur revenu et leur niveau de vie. 

Les motivations pour être à temps partiel sont particulièrement révélatrices. 24% des femmes à temps partiel expliquent que leur choix d’être à temps partiel est motivé par la garde d’enfants ou de personnes dépendantes. Ce taux tombe à 7,6% pour les hommes . Ces justifications montrent que les inégalités en termes de travail à temps partiel ne sont pas que le résultat d’un modèle économique, mais aussi d’un modèle sociétal. 

 

Il est important de comprendre que derrière tous ces chiffres se trouvent des personnes, en l’occurrence dans cet article majoritairement des femmes. Des femmes dont le quotidien est sévèrement affecté par des revenus tronqués par des modèles économiques et sociétaux injustes. Il est important de comprendre qu’il est grand temps d’agir. Le Groupe de travail sur la discrimination à l’égard des femmes et des filles des Nations Unies l’a noté noir sur blanc : “Les inégalités de genre et la pauvreté des femmes et des filles sont le fruit des décisions qui ont été et continuent d’être prises aux niveaux mondial, régional et national en matière de politique économique.” Alors pour 2024, Womenpreneur continuera de lutter pour une justice économique entre hommes et femmes. Et appelle tous les candidat.e.s aux élections à faire de même, qu’ils soient élu.e.s ou non.

 

https://documents-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/G23/069/67/PDF/G2306967.pdf?OpenElement, p.5

https://statbel.fgov.be/sites/default/files/files/documents/Analyse/FR/7_FR_ongelijkheid_web_v3.pdf, p.9

https://statbel.fgov.be/fr/themes/emploi-formation/salaires-et-cout-de-la-main-doeuvre/ecart-salarial

https://www.cffb.be/lecart-salarial-entre-les-hommes-et-les-femmes/

https://www.ccecrb.fgov.be/dpics/fichiers/2022-02-15-12-27-01_cce20213520rapportsurlecartsalarialentrelesfemmesetleshommesdiagnosticetdeterminants(3).pdf, p.7

https://statbel.fgov.be/fr/themes/emploi-formation/marche-du-travail/le-travail-temps-partiel#news

ibid

https://documents-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/G23/069/67/PDF/G2306967.pdf?OpenElement, p.5

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